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Le défunt cinéaste québécois Claude Jutra se trouvait mercredi au centre d'une controverse post-mortem pour des allégations de pédophilie qui ont forcé de le rebaptiser «Le gala a lieu dans un mois (le 20 mars). L'important maintenant c'est de trouver un nom qui sera éventuellement provisoire mais qui pourrait aussi être le nom définitif pour les prochaines années», a déclaré en conférence de presse Ségolène Roederer, directrice générale de Cinéma Québec, l'académie organisant ce qui était jusqu'à présent appelé la «Soirée des Jutra».

Chaque année depuis 1999, le milieu du cinéma québécois récompense le meilleur de la production cinématographique de la province francophone canadienne en décernant les prix Jutra, équivalent local des Oscars américains ou des Césars français.

Ces prix ont été baptisées en l'honneur du réalisateur de «Mon oncle Antoine» (1971), fable nordique jouée dans un village du Québec rural, considéré comme le «plus grand film canadien de tous les temps» par la critique du Festival des films de Toronto, le plus important au pays.



Claude Jutra avait aussi dirigé, écrit et interprété le personnage principal de «A tout prendre» (1964), tribulation d'un intellectuel anticonformiste, en quête d'identité, qui valse entre une relation avec une femme noire et des pulsions homosexuelles dans le Montréal du début des années 1960.

Dans une première biographie parue cette semaine sur ce phare du cinéma québécois, suicidé en 1986, l'historien Yves Lever, sur la base de témoignages confidentiels, a prêté à Claude Jutra des relations sexuelles avec des adolescents, ce qui a lancé une vive polémique sur le cinéaste mais surtout sur les prix nommés en son honneur.

Le quotidien La Presse en a rajouté en publiant mercredi le témoignage d'une victime, présumée car n'ayant jamais porté plainte, qui dit avoir subi des attouchements sexuels dès l'âge de six ans et sur plusieurs années de la part du cinéaste.

Réagissant aux informations de La Presse , la ministre québécoise de la Culture, Hélène David, a qualifié le témoignage «d'insoutenable».

La ministre a demandé un rapport à la Commission de la toponymie afin d'avoir une liste de l'ensemble des lieux publics nommés en l'honneur du cinéaste dont les films ont influencé des dizaines de réalisateurs.

La Cinémathèque québécoise, archives du 7ème art de la Belle Province, a d'ores et déjà débaptisé sa salle de projection principale, jusqu'à présent dénommée Claude Jutra. «Les membres du Conseil d'administration ont pris la décision de retirer la dénomination de notre principale salle de projection», a indiqué l'institution par communiqué.

Un parc et une rue de Montréal ont également été débaptisées mercredi, a annoncé Denis Coderre, maire de la métropole du Québec.