La paix sociale à tout prix ! Le gouvernement multiplie les gestes pour calmer le front social et anticiper sur d’éventuels mouvements susceptibles de remettre en question les plans mis en place. Il dépense sans compter et sans se soucier de la légalité des mesures annoncées qui risquent de devenir problématiques en l’absence d’un cadre légal pour leur mise en œuvre. Les exemples sont légion. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a pris, depuis juin dernier, plusieurs décisions en faveur des jeunes chômeurs.

crédits sans intérêtLa dernière mesure est celle annoncée à partir de Laghouat et qui concerne l’octroi des crédits sans intérêt aux jeunes bénéficiaires de l’Ansej et de la Cnac. Cette mesure est déjà appliquée, mais elle suscite le mécontentement des banquiers qui se plaignent d’une absence d’un texte de loi pour réglementer ce genre de crédit. «Nous avons reçu une instruction d’appliquer le crédit sans intérêt pour les bénéficiaires de l’Ansej et de la Cnac. Mais en parallèle, il n’y a pas de loi pour réglementer cette mesure. Le ministre des Finances avait annoncé l’annulation de la loi de finances complémentaire (LFC 2013). Nous sommes contraints d’attendre la loi de finances 2014, mais entre-temps, les banques agissent dans l’illégalité», affirme un banquier qui a préféré garder l’anonymat.

Tout en continuant à gérer cette mesure populiste et anti-économique, les responsables des banques publiques devront prendre leur mal en patience en attendant la promulgation d’un texte législatif qui légalisera leurs dépenses. Ils sont contraints d’attendre la tenue d’un Conseil des ministres, seule institution habilitée à avaliser les projets de texte de loi, qui risque de ne pas se réunir de sitôt. Et pour cause, la maladie et la longue convalescence du Président qui est, en vertu de la Constitution, le seul à pouvoir présider une réunion du Conseil des ministres. Ainsi, soit les mesures du gouvernement Sellal seront appliquées dans l’illégalité, soit c’est le blocage qui pourrait engendrer de nouvelles tensions sociales. Le gouvernement semble avoir choisi la première solution, en attendant ou en espérant un rétablissement du chef de l’Etat.

Outre les crédits sans intérêt, l’Exécutif s’apprête à réintroduire le crédit à la consommation pour l’achat de produits made in Algeria, pour satisfaire ses partenaires socio-économiques, en l’occurrence l’UGTA et le patronat. Et là encore, les mesures, qui seront prises dans la prochaine tripartite, devront être introduites dans la prochaine loi de finances pour qu’elles deviennent applicables légalement. De même pour les crédits aux jeunes qui souhaitent se marier et la révision à la hausse du montant du crédit à la location de logements. Du coup, l’Exécutif, soucieux d’afficher sa présence en l’absence de son chef d’orchestre, se retrouve coincé entre deux feux : celui du respect des lois de la République et la nécessité de calmer le front social à l’occasion de la rentrée sociale et politique. En plus de la réglementation, la paix sociale a un coût financier exorbitant que le budget de l’Etat soutiendra difficilement, d’autant plus que les recettes pétrolières sont instables et la facture d’importation des biens de consommation ne cesse de grimper. D’où viendra, donc, l’argent nécessaire pour le financement de toutes ces mesures sur le terme et selon quel cadre légal ?