misrataSamedi soir, le port restait "totalement bloqué", selon Fadel Moukadem, de l'ONG Mercy Corps: un navire humanitaire arrivé jeudi était toujours à quai, tandis que trois autres bateaux attendaient au large le feu vert de l'Otan pour accoster.

"L'Otan m'a dit qu'il y avait encore des mines marines" posées par les forces du dirigeant contesté Mouammar Kadhafi, a indiqué M. Moukadem.

La veille, l'Otan avait déjà annoncé avoir neutralisé des mines mouillées près de Misrata, troisième ville de Libye à 200 km à l'est de Tripoli, et "intercepté de petits bateaux" qui les déposaient.

Juste à côté du port, dans un camp de tentes manquant de tout, l'attente cauchemardesque use les nerfs des centaines de réfugiés africains, en majorité Ghanéens et Nigériens, qui attendent leur évacuation, dans des "conditions inhumaines", selon le Croissant Rouge.

L'endroit n'est que désolation poussiéreuse, cailloux, ordures et tentes misérables faites de bric et de broc.

"Il n'y a pas d'eau, pas de nourriture, rien", se plaint le jeune Ghanéen arborant dreadlocks et chemise à fleurs. Heureusement, "hier, le Croissant Rouge nous a apporté des médicaments et un peu d'eau".

Mais de nourriture, qui se fait aussi rare pour les habitants de la ville assiégée depuis plus de deux mois, pas de trace. Avant, "les gens nous apportaient des boissons et à manger, mais maintenant ils ne viennent plus, et ce n'est pas facile pour nous", explique-t-il.

"Nous sommes environ 1.000 personnes" à espérer un hypothétique départ, dit le jeune homme, qui n'a pas souhaité donner son nom, alors que le régime a menacé vendredi d'attaquer tout navire tentant d'accoster au port.

"Le nombre n'est pas vraiment déterminé", tempère Fadel Moukadem, "il change d'un moment à l'autre. Lorsque des attaques se produisent ici, les réfugiés partent et se mettent à l'abri".

Mardi, les forces pro-Kadhafi avaient bombardé le port, essentiel pour Misrata sous perfusion humanitaire, avant d'en être chassées par une frappe aérienne de l'Otan et une contre-attaque rebelle.

Mais une roquette était tombée sur le camp, tuant un Nigérien et faisant plusieurs blessés. Depuis, tous vivent dans la hantise d'un nouveau drame. D'autant que "des tirs d'obus de mortier ont de nouveau touché le port il y a deux jours, sans grand dommage", explique Fadel Moukadem.

Le regard fatigué et triste, Mohammed Hamza, 25 ans, n'en peut plus. "Ils tirent des bombes sur nous, nous font tellement de choses. Nous devons partir de ce pays, nous en avons assez de la Libye", lance le Ghanéen.

"Beaucoup d'entre nous sont partis, beaucoup d'entre nous sont toujours ici, beaucoup d'entre nous sont malades", scande-t-il, "nous prions Dieu pour que tous ici, tous les étrangers, nous puissions partir d'ici".

Au loin, le grondement des explosions autour de l'aéroport, où se concentrent les combats depuis plusieurs jours, est quasiment ininterrompu. Comme vendredi, des chars pro-Kadhafi tentent d'avancer vers la ville, à nouveau sous le feu d'obus de mortier et roquettes tirées au hasard.