imgUn peu plus tôt, Hillary Clinton, la secrétaire d'État américaine, avait évoqué de possibles sanctions : « Tout sera mis sur la table. Nous étudierons toutes les options possibles pour tenter de mettre un terme à la violence, pour tenter d'influencer ce gouvernement ».

Parmi les options envisagées, figure un gel des avoirs du gouvernement libyen et de M. Kadhafi, a précisé P.J. Crowley, le porte-parole du département d'État.

L'Union européenne se mobilise

De leur côté, les 27 États membres de l'Union européenne se sont par ailleurs mis d'accord sur le principe de sanctions à l'égard de la Libye.

Mais d'après certains diplomates, plusieurs jours pourraient être nécessaires pour que les 27 s'entendent sur la nature de ces sanctions.

Le président français Nicolas Sarkozy a fait savoir plus tôt mercredi qu'il avait demandé à sa ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, d'adopter des sanctions concrètes « afin que tous ceux qui sont impliqués dans des violences en cours sachent qu'ils devront assumer les conséquences de leurs actes ».

« Ces mesures concernent notamment la possibilité de les traduire en justice, l'interdiction d'accès au territoire de l'Union et la surveillance des mouvements financiers », a-t-il affirmé à l'occasion du Conseil des ministres, selon la déclaration transmise par l'Élysée. « Je souhaite en outre que soit examinée la suspension des relations économiques, commerciales et financières avec la Libye, jusqu'à nouvel ordre ».

Le président de l'Union européenne, Herman Van Rompuy, a pour sa part vigoureusement condamné mercredi les événements qui se produisent en Libye, où des informations jugées crédibles par le ministère italien des Affaires étrangères font état de 1000 morts au cours des derniers jours.

« J'éprouve une horreur particulière des violences qui sont commises contre le peuple qui se lève pour la liberté et la justice en Libye », a déclaré M. Van Rompuy, au cours d'une conférence de presse tenue à Prague, en République tchèque.

« J'ai vu des crimes horribles qui sont inacceptables et qui ne peuvent pas rester sans conséquences », a-t-il ajouté. « Je condamne l'usage de la violence, de l'agression et de l'intimidation contre les manifestants en Libye. J'appelle à la cessation immédiate de l'usage de la force. »

Un porte-parole de la Commission européenne, Olivier Bailly, a fait valoir que l'Europe dispose d'un levier important, car ses importations de gaz de Libye représentent 55 % du produit intérieur brut libyen. Seule l'Italie est assez dépendante des approvisionnements en gaz libyen, qui représentent 12 % de ses importations de cet hydrocarbure.

« Pour l'Union européenne, le gaz libyen ne représente pas une part importante des besoins; à l'inverse, 55 % du PIB libyen dépend des exportations de gaz vers l'UE », a-t-il dit.

Peu de temps après le discours télévisé de Mouammar Kadhafi, mardi, la haute représentante de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, avait annoncé que l'Union européenne suspendait les négociations en cours avec Tripoli pour un accord-cadre commercial.

La situation délicate de l'Italie

En Italie, le chef du gouvernement italien, Silvio Berlusconi, a invité la communauté internationale à s'opposer aux « violences injustifiées et aux dérives islamistes » en Libye et dans les autres pays d'Afrique du Nord.

« Toute la nuit, et ce matin aussi, nous avons été en contact avec d'autres leaders européens et américains pour suivre la situation en Libye ... : nous ne voudrions pas qu'elle évolue vers un fondamentalisme islamique dangereux », a plaidé le chef de gouvernement italien.

« Nous devons être attentifs aussi à ce qui se produira après dans ces pays avec lesquels nous avons traité jusqu'à présent pour mille raisons et qui sont d'importants fournisseurs d'énergie pour nous », a-t-il ajouté.

Mardi, le groupe italien ENI a annoncé avoir « suspendu temporairement » certaines activités de production de pétrole et de gaz naturel et interrompu la fourniture de gaz par le gazoduc Greenstream, qui relie la Libye à l'Italie.

L'Italie, ancien pays colonisateur et plus important partenaire commercial européen de la Libye, craint que Tripoli ne mette à exécution les menaces proférées par certains de ses diplomates de laisser passer les migrants africains si l'Union européenne soutient la contestation du régime. Selon Rome, 200 000 à 300 000 immigrés libyens pourraient alors affluer dans le pays.

Le ministre italien de l'Intérieur a rencontré ses homologues français, grec, espagnol, chypriote et maltais mercredi à Rome pour discuter des effets potentiels d'une telle vague d'immigration.

Réunion du Conseil des droits de l'homme

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les droits de l'homme a annoncé mercredi que le Conseil des droits de l'homme de l'ONU tiendra vendredi une session spéciale sur la situation en Libye, à la demande de l'Union européenne.

Réuni en urgence mardi pour discuter de la situation dans le pays de 6 millions d'habitants, le Conseil de sécurité des Nations unies a condamné la répression des manifestants par le régime du colonel Kadhafi et réclamé « la fin immédiate » des violences.

Le premier ministre britannique, David Cameron, a soutenu mercredi que le Conseil de sécurité des Nations unies devrait adopter une résolution à ce sujet.

« Si j'aimerais que nous allions plus loin et que nous ayons une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies? Oui, assurément. Je crois que ce serait une bonne chose », a dit Cameron au cours d'une visite au Qatar.

« Les 15 pays membres condamnent la violence et l'usage de la force contre des civils, déplorent la répression contre des manifestants pacifiques et expriment leur profond regret à propos de la mort de centaines de civils », a déclaré Maria Luiza Ribeiro Viotti, ambassadrice du Brésil et présidente en exercice du Conseil de sécurité.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est dit très inquiet des violences en Libye et a appelé à une action internationale contre Mouammar Kadhafi.

« Ceux qui sont responsables d'avoir brutalement versé le sang d'innocents doivent être punis », a déclaré le chef de l'ONU. « Le gouvernement libyen doit assumer sa responsabilité qui est de protéger son peuple », a ajouté Ban Ki-moon.

Paul Martin réclame l'intervention de l'ONU

L'ancien premier ministre canadien Paul Martin s'est également exprimé sur le sujet et a demandé une intervention de l'ONU.

Il a affirmé que le principe de « responsabilité de protéger » doit être appliqué en Libye : « Il y a des choses que l'on peut faire immédiatement. On doit établir par exemple une zone d'exclusion aérienne. C'est incroyable de laisser des avions de la Libye tirer sur leur propre population ».

« Nous avons la capacité de l'arrêter. Il faut mettre en place un embargo complet sur les armes », a précisé M. Martin.

Les limites de la justice internationale

Le procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno-Ocampo, a expliqué mercredi que le tribunal ne peut enquêter sur les « crimes présumés » commis en Libye, du moins jusqu'à nouvel ordre.

« La CPI ne peut intervenir concernant les crimes qui auraient été commis en Libye que si les autorités libyennes acceptent la compétence de la Cour », a déclaré M. Moreno-Ocampo dans un communiqué.

« À défaut, le Conseil de sécurité de l'ONU peut éventuellement prendre l'initiative de déférer la situation à la Cour », a-t-il ajouté. « Le Bureau du procureur n'interviendra qu'à l'issue de l'une ou l'autre décision ».