Libyan Human Rights Solidarity (LHRS), ONG basée à Genève, a fait état lundi soir de «massacres» perpétrés à Tripoli par des «mercenaires étrangers» à la solde de Kadhafi. Un habitant de Tripoli a de son côté déclaré à la chaîne Al Djazira que l'armée de l'air libyenne bombardait de nombreux sites de la capitale où elle a fait un grand nombre de morts. Prié de dire si le bombardement se poursuivait, il a répondu: «Ça continue, ça continue. Ils prennent pour cible tout ce qui bouge».

La LHRS a articulé le chiffre de 300 tués et un millier de blessés à Benghazi, deuxième ville du pays et centre de la révolte depuis le 15 février. D'après la Fédération internationale des Ligues de droits de l'Homme (FIDH), qui avance elle un bilan de «300 à 400 morts», plusieurs villes, dont Benghazi, sont tombées aux mains des manifestants à la suite de défections dans l'armée.

Deux avions militaires et deux hélicoptères civils en provenance de la Libye atterrissent à Malte
Les avions avaient à leur bord quatre soldats qui ont affirmé s'être enfuis de la base militaire de Benghazi, à 1.000 km à l'est de Tripoli, tombée au main des manifestants, ont indiqué à l'AFP des sources militaires maltaises.

Selon ces sources, les hélicoptères civils transportaient quant à eux sept personnes se disant de nationalité française. Elles ont déclaré travailler sur une plate-forme pétrolière en haute mer, du côté de Benghazi, et ont demandé la protection des autorités maltaises.

Un ministre démissionne
Le ministre libyen de la Justice Moustapha Abdel Jalil a démissionné plus tôt dans la journée «pour protester contre l'usage excessif de la force» contre les manifestants. Une coalition de dignitaires musulmans libyens, le Réseau des oulémas libres de Libye, qui regroupe plus de 50 érudits musulmans, a de son côté rendu publique une déclaration appelant tous les musulmans à se soulever contre le régime.

Radio, TV et postes de police saccagés
Les manifestations contre le colonel Kadhafi - arrivé au pouvoir en 1969 et autoproclamé «Guide de la révolution»- avaient gagné dimanche Tripoli. Selon des témoins contactés lundi, le siège d'une télévision et d'une radio publiques ont été saccagés dans la soirée par des manifestants. Des postes de police, des locaux des comités révolutionnaires, la «salle du peuple» accueillant des réunions officielles ainsi que le bâtiment abritant le ministère de l'Intérieur ont été incendiés, selon d'autres témoins.

Riposte sanglante annoncée
Dans une allocution télévisée dans la nuit, Seif Al-Islam a prévenu les manifestants que la riposte serait sanglante. Les «forces qui tentent de détruire la Libye et de la démembrer sont armées et le résultat sera une guerre civile. Personne ne se soumettra à l'autre et nous nous battrons», a-t-il prévenu.

Plus tard dans la journée, il a annoncé une commission d'enquête sur les violences.

Condamnations à l'étranger
A l'étranger, l'Union européenne a condamné lundi après plusieurs jours de silence la répression des manifestations en Libye. «Profondément préoccupée» par la tournure des évènements et les conditions sanitaires sur place, la Suisse à salué le courage des Libyens. Elle a appelé les forces de sécurité «à renoncer à recourir à la force».

La Russie a appelé «toutes les parties à trouver une solution pacifique» et «à entreprendre les réformes qui s'imposent». Le fils du colonel Kadhafi a promis à cet égard des réformes concernant le code pénal et un dialogue sur la Constitution, ainsi que «des perspectives de liberté» pour la presse et la société civile.

Défections
Malgré ces tentatives d'enrayer le mouvement, les évènements en Libye ont aussi entraîné des défections dans le personnel diplomatique. C'est le cas notamment de l'ambassadeur de Libye en Inde, d'un diplomate libyen en Chine et de trois employés non diplomates à Stockholm.

Sur les marchés, l'instabilité dans ce riche pays pétrolier et les craintes de propagation aux pays de la région gros producteurs de brut ont fait grimper les cours.