Même s’il ne fait qu’observer un protocole qu’il affectionne tant, Bouteflika prend, toujours est-il, position dans cette situation de renversement de président et de régime en Tunisie. Son amitié avec le président déchu, Zine El Abidine, aura vécu, balayée par l’intensité du bouleversement politique que le soulèvement populaire a provoqué en Tunisie. «Il m’est particulièrement agréable, au moment où je survole l'espace aérien de votre pays frère, en direction de l'Egypte pour prendre part au deuxième sommet économique arabe, de vous adresser mes sincères salutations fraternelles, en vous souhaitant plein succès afin que vous puissiez faire parvenir la Tunisie à bon port», a écrit dans son message le président Bouteflika, ajoutant : «Partant des liens fraternels et de bon voisinage qui unissent nos deux peuples, je suis pleinement confiant que vous trouverez en le génie tunisien authentique une source d'inspiration pour œuvrer au bien-être de votre cher peuple.» Aucun mot, ne serait-ce qu’une allusion, à la révolte populaire qui vient de faire s’écrouler l’imprenable citadelle qu’était le palais de Carthage où trônaient Ben Ali et son épouse Leïla Trabelsi, aujourd’hui tous les deux réfugiés chez le roi d’Arabie saoudite.

Le vent de la contestation sociale et politique qui, tel un tsunami, a balayé le régime Ben Ali a laissé sans voix près d’une semaine durant le président Bouteflika qui s’est refusé, jusque-là, à la moindre déclaration publique. Ceci alors qu’il s’en est assurément préoccupé. En atteste la déclaration du conseiller du président Obama à la sécurité et la lutte contre le terrorisme, John Brennan qui, lundi, affirmait que la situation en Tunisie a été au menu de son entretien avec le président Bouteflika. Cela dit, le président Bouteflika, qui est arrivé mardi à Charm el-Cheikh pour prendre part au sommet économique des chefs d’Etat arabes, ne pouvait faire longtemps mystère de sa position par rapport à cet événement majeur qui fait l’actualité mondiale.

La question se trouve inscrite au menu du sommet, a confirmé mardi le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. De plus, le ministre tunisien des affaires étrangères, Kamel Mordjane, a fait le déplacement en Egypte pour tenir ses homologues arabes informés de la situation qui prévaut dans son pays. Mardi, il a déclaré que le peuple tunisien avait dit son mot. «Le peuple tunisien a dit son mot et est sorti vainqueur de ce soulèvement populaire», a-t-il affirmé, ajoutant que «nous voudrions confirmer qu’il s’agit d’un gouvernement de transition : son but est clair et son mandat limité par la loi». Le ministre tunisien des Affaires étrangères a indiqué par ailleurs que l’élection présidentielle que son gouvernement a pour mission de préparer sera supervisée par des observateurs étrangers.