GrossesseLes médecins s'inquiètent depuis longtemps des effets que peut avoir une grossesse, avec les changements hormonaux qu'elle implique, sur des femmes ayant survécu au cancer du sein. Ils craignent notamment que cela n'entraîne un retour de la maladie et déconseillent à des patientes de tomber enceintes.

Dans une étude présentée pendant la conférence européenne de Barcelone, des spécialistes affirment en revanche que les femmes ne prennent aucun risque en tombant enceinte, cette grossesse ne semblant pas liée, selon eux, à un retour de la maladie.

Au sein de la population, en règle générale, les femmes ayant des enfants tôt ou plusieurs grossesses présentent des risques moins élevés de contracter un cancer du sein.

Le Dr Hatem Azim, de l'Institut Jules Bordet en Belgique, et ses collègues ont examiné les résultats de 14 essais cliniques ayant suivi plus de 1400 femmes enceintes guéries après un cancer du sein. Ces femmes étaient tombées enceintes de quelques mois à quelques années après avoir fini leur traitement. Ils ont comparé ces femmes à plus de 18 000 autres qui avaient eu le cancer mais pas de grossesse.

Les chercheurs ont découvert que les femmes ayant eu une grossesse avaient 42% de risques en moins de mourir par rapport à celles qui n'avaient pas été enceintes. Le Dr Azim estime que ce chiffre est probablement due au fait que les femmes qui avaient naturellement une meilleure santé sont celles qui ont eu des enfants. «J'espère que (ces résultats) changeront ce que les médecins disent à leurs patientes», a-t-il plaidé. «Il n'y a aucune raison de dire aux femmes ayant survécu au cancer du sein de ne pas tomber enceintes».

«Pendant de nombreuses années, la grossesse a été considérée comme un risque pour les femmes ayant eu» cette maladie, a observé Maria Leadbeater, une spécialiste de Breast Cancer Care, une organisation caritative britannique. «Mais cette étude semble montrer que le risque n'est pas un problème une fois que vous avez été soignée». Cette experte n'a pas pris part à l'étude du Dr Azim.

Mme Leadbeater a souligné que chaque patiente doit être conseillée en fonction du type de cancer du sein qu'elle a eu et de la manière dont elle a réagi au traitement. Les femmes nécessitant une thérapie hormonale doivent la suivre pendant cinq ans, un délai pendant lequel les médecins déconseillent la grossesse.

Le Dr Azim considère que le lien entre hormones et cancer du sein est sans doute plus compliqué que la communauté scientifique ne le pensait. Certains cancers du sein seraient stimulés par les oestrogènes, une hormone stimulée par la grossesse. Mais des taux importants d'oestrogènes pourraient tuer les cellules cancéreuses, poursuit l'auteur de l'étude.

Des études ont prouvé l'efficacité d'autres hormones élevées pendant la grossesse, comme la prolactine responsable de l'allaitement, contre le cancer du sein. «Ce que nous voyons, c'est seulement le sommet de l'iceberg», note le Dr Azim. «C'est trop simple de dire que la grossesse stimule les hormones et que c'est mauvais pour le cancer du sein».