Un colloque international sous le thème «Les mythes anciens à l’épreuve de la modernité dans les littératures africaines » s’est déroulé sur deux jours (21 et 22 novembre) à la salle El-Mouggar à l’initiative du Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques en présence de nombreux chercheurs, écrivains et experts du continent. 3 Cette rencontre culturelle a été présidée par la ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, et s’inscrit dans le prolongement du premier colloque organisé sous le thème de l'anthropologie durant le Panaf. Plusieurs écrivains et chercheurs algériens et africains, Benaouda Lebdai qui s’est penché sur «Le rôle décisif des mythes endogènes dans le processus d'intégration à la modernité» ; Elvire Maurouard, écrivaine tahitienne, a expliqué que «le mythe était l'idéologie principale des sociétés africaines, tout en soulignant que le colloque aura à débattre de l'importance des mythes dans la littérature africaine, mettre la lumière sur les problèmes que connaît la littérature en Afrique et proposer des solutions». Hachi Slimane, initiateur du colloque, est revenu sur la nécessité d’offrir cette nourriture de l'esprit aussi vitale que la nourriture des corps afin de multiplier les chances de voir émerger un nombre toujours grandissant de créateurs. Durant ces deux journées d’étude, les chercheurs et écrivains (Ismaïl Abdoun, Amina Bekkat, Malika Hadj Naceur, Caya Makhele, Jeanne-Marie Clerc, Jacqueline Jondot) Caya Makhélé) pour ne citer que ceux-là se sont donc penchés sur l'importance des mythes ancestraux en tentant de mettre en évidence la multiplicité des cultures et de leur symbiose avec la modernité et des influences que ces deux pôles peuvent avoir sur les littératures africaines. Est-ce que les mythes ancestraux construisent ou déconstruisent cette littérature africaine, souvent rattachée à ses coutumes et ses traditions mais aussi confrontée aux nouvelles technologies de la communication ? Lors de la rencontre qui avait réuni à la Bibliothèque nationale en juillet passé des écrivains africains, intervenant notamment sur la problématique des mythes, Calixthe Beyala disait lors de son intervention que «l’écrivain africain est une construction qui ne commence pas avec l’école des blancs mais pendant son enfance nourrie de mythes locaux». Finalement les mythes ancestraux et la modernité se rencontrent et s’entremêlent pour construire la mythologie personnelle de l’écrivain, celui-ci ne peut évoluer en dehors de son temps et époque et la modernité est un fait. La littérature africaine s’inspire profondément de cette diversité culturelle et raciale. L’écrivain africain baigne dans cette atmosphère identitaire qui l’inspire dans sa création romanesque, même si ces mythes ne sont pas forcément le sujet phare de ses écritures, mais cela lui donne un cachet particulier où toute une métaphore est souvent perceptible. Les écrivains sont nourris non seulement par leurs propres mythes mais également par les mythes des autres nations. L’oralité dans le passé avait contribué largement à la confusion entre fiction et réalité, entre mythe au fait, et informations, une nécessité pour combler le manque de «sources» fiables. De nos jours, les légendes inspirent toujours les écrivains et pas que les écrivains africains ; le mythe du roi Arthur, de la reine Belkis, l’LIlith, Ulysse, le Graal, l’Atlantide ou encore le mythe de Sisyphe faisant déjà partie du cycle de l’absurde d’Albert Camus. L’écrivain camerounais Eugène Ebode cite le mythe de Sisyphe qui, d’après lui, déboucherait sur le mythe décisif, «celui du Phénix parce que renaissant et universel mais dont le point d’envol reste l’Afrique». Dans le contexte moderne, certains récits s’apparentent à des mythes, certes, récents, parfois urbains ce qui est communément appelé «légendes urbaines». Et qui démontrent que les écrivains, lorsqu’ils arrivent à démystifier ou à remettre en cause des idées parfois «toutes reçues», vont inévitablement puiser dans leur «quotidien» pour recréer les éléments nécessaires à leurs imaginaires et se recomposer alors de nouvelles légendes.