Comme le veut la «tradition», le ministère de la Solidarité et les communes vont distribuer des millions de couffins aux familles nécessiteuses. Trois milliards de dinars sont mobilisés par l’Etat pour ces opérations dites de «solidarité». Le mécanisme est rodé depuis des années : les listes des démunis sont élaborées au niveau des APC qui se chargent de la distribution. Le spectacle des mères et pères de famille faisant la queue pour récupérer ces couffins est affligeant. Le ministre de la Solidarité avait lui-même reconnu que ces scènes étaient préjudiciables à l’image de l’Algérie. Il avait promis l’année dernière que cette formule serait abandonnée au profit d’un mécanisme qui permettrait le virement direct du montant de l’aide dans les comptes des personnes dans le besoin. Force est de constater que rien n’a été fait dans ce sens. Il faudra attendre l’année prochaine peut-être. Les personnes habilitées à tirer profit de cette opération de «solidarité» continueront de faire des affaires qui s’avèrent très juteuses. Le processus de sélection des fournisseurs des produits de première nécessité est loin d’être transparent.

Opération couffin du RamadanQui a le droit d’y prendre part ? Existe-t-il des critères préalablement défi- nis ? Un cahier des charges et un appel d’offres sont-ils prévus ? Autant de questionnements qui jettent le discrédit sur ce mode opératoire sans compter qu’un Etat ne peut se substituer aux œuvres caritatives. Un Etat a le devoir d’assister les personnes dans le besoin tout au long de l’année. S’il ne le fait pas, il se rend coupable de non-assistance à personne en danger. Lorsqu’on est pauvre, on l’est toute l’année et pas seulement pendant le mois de Ramadan.

Cette catégorie de citoyens exige la mise en place d’une véritable politique sociale. Cette dernière est quasi inexistante dans une république qui préfère se voiler la face et qui a fait le choix de ne pas regarder en face une société qui s’appauvrit. Les statistiques sur la pauvreté font l’objet d’un véritable embargo. Il a fallu l’arrivée du Ramadan pour que le ministère de la Solidarité reconnaisse l’existence de 1,2 million de familles dans le besoin. Des personnes qui toute l’année doivent se démener pour nourrir, scolariser et soigner leurs enfants. Seules face à leur destin, elles sont abandonnées par un Etat qui, soucieux de son image de marque, préfère leur tourner le dos plutôt que de mettre en place une véritable politique d’aide.