Il a été assassiné un certain 15 mars 1962 alors qu'il participait à une réunion des Centres sociaux éducatifs à Ben Aknoun (Alger), dont il était inspecteur. L'attentat a été commis par l'OAS à quelques jours seulement de la signature des accords d'Évian. C'est le 8 mars 1913 que naquit l'écrivain à Tizi Hibel (Tizi Ouzou) dans une famille très modeste, pour ne pas dire misérable, comme il en existait partout dans l'Algérie de l'époque. Combien de temps faut-il pour produire une intelligence de cette trempe et accumuler tant de savoir ? On l'a assassiné dans le but bien évident de priver l'Algérie indépendante de son élite, de ses guides et de son intelligentsia, et ce parce que l'homme était aussi un éducateur, un formateur des cadres de demain et un observateur lucide de la société et de ses soubresauts. À travers cet acte ignoble, l'OAS visait l'Algérie. « A retrouver tant d'intelligence, de sensibilité, de pouvoir créateur, s'avive le regret d'une mort injuste qui faisait disparaître le 15 mars 1962, l'un des plus grands écrivains d'Algérie », disait son ami, l'écrivain Emmanuel Roblès. Reconnu et ayant accédé au sommet de l'échelle dans le domaine de la littérature, l'homme n'a pas pour autant sousestimé ou délaissé son métier d'instituteur dont la mission lui tient à coeur. Dans un extrait de Lettres à ses Amis, on peut lire : « Il est courant pour les écrivains de parler de second métier. Pour ma part, je n'ai qu'un métier. Ce métier je le remplis bien. Dans ce domaine, nos efforts n'ont jamais été stériles ou vains." Mouloud Féraoun étonne par son style simple mais réservé. Ses oeuvres sont d'une lucidité éclatante et sa transcription de la réalité tient à la fois du roman, du compte-rendu journalistique et de l'étude sociologique. En somme, un auteur réaliste, sans artifices et un témoin de son temps qui rendait compte de la vie quotidienne des siens sans honte ni maquillage. L'homme ne cherchait pas à plaire mais à dénoncer. Dans L'Anniversaire, il écrit : « La floraison (de la littérature algérienne) s'explique par notre impérieux besoin de témoigner sincèrement, entièrement, de saisir notre réalité sur le vif et dans tous ses aspects afin de dissiper des malentendus tenaces et de priver les consciences tranquilles de l'excuse de l'ignorance. La voie a été tracée par ceux qui ont rompu avec un Orient de pacotille pour décrire une humanité moins belle et plus vraie, une terre aux couleurs moins chatoyantes mais plus riche de sève nourricière, des hommes qui luttent et souffrent et sont les répliques exactes de ceux que nous voyons autour de nous…» Mouloud Feraoun était un homme juste qui s'est éteint injustement. Ainsi l'a voulu l'OAS à quelques jours de l'Indépendance de l'Algérie.