boudief.jpg Photo: Mohamed Boudiaf - Lambareek Boumaarafi

Mohamed Boudiaf est assassiné en direct, lors d'une conférence diffusée à la télévision. «Les autres pays nous ont devancés par la science et la technologie. L’islam…», ce fut le dernier mot prononcé par Mohamed Boudiaf. Une explosion à droite de la tribune où il se tient vient brutalement d’interrompre son discours. Quelques secondes après, il est criblé de balles par un homme en uniforme armé d’une kalachnikov.

Si on connaît l’assassin, Lambareek Boumaarafi qui sera arrêté, les questions restent nombreuses sur les circonstances du meurtre. On se demandent qui a pu armer le bras du tueur, trop d’éléments écartant la thèse de l’acte isolé. La motivation de son assassinat est toujours sujette à controverse, entre la piste d'une action isolée commise par un élément des services de sécurité ayant des sympathies islamistes et celle d'un complot plus vaste.

Né le 23 juin 1919 à Ouled Madi, wilaya de M'Sila, Mohamed Boudiaf est l'un des chefs historiques du FLN. Le 22 octobre 1956, Boudiaf est arrêté, avec d'autres chefs du FLN, par l'armée française à la suite du détournement de l’avion civil marocain qui le menait vers la Tunisie. Mis en prison, Il devient, en 1958, le ministre d’État du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Le 18 mars 1962, Boudief est libéré.

hocine_ait-ahmed_2.jpg Photo : 27 octobre 1958. Ahmed Ben Bella (à droite), Mohamed Khider, Hocine Aït Ahmed, Mohamed Boudiaf et Mustapha Lacheraf

Le 20 septembre 1962, Mohamed Boudiaf fonde en opposition son propre parti, le Parti de la révolution socialiste (PRS). Jeté en prison le 23 juin 1963, puis condamné à mort en 1964 par le régime Ben Bella, il quitte l'Algérie et rejoint la France puis le Maroc.

Le 16 janvier 1992, après la démission du président Chadli Bendjedid (au soir du 11 janvier), Mohamed Boudiaf revient en Algérie en sauveur. L'ex-FIS avait largement remporté la majorité au 1er tour des élections législatives, Chadli Bendjedid, après avoir dissout l'Assemblée nationale et laissé un vide constitutionnel, démissionne et le commandement militaire annule les élections.

Mohamed Boudiaf est rappelé au pays pour devenir le président du Haut Comité d’État (de facto chef de l’Etat), en charge provisoire des pouvoirs de chef de l'État. Par son long exil, il apparaissait en effet paradoxalement comme un homme neuf, non impliqué dans les tribulations du pouvoir et donc susceptible de sortir le pays de l’impasse.

Souhaitant une Algérie démocratique tournée vers la modernité, il disait vouloir mettre fin à la corruption des généraux et militaires qui gangrenait l'État. Mais il est assassiné cinq mois plus tard au cours d'une conférence des cadres.

Un sous-lieutenant du groupe d'intervention spécial (GIS), Lambarek Boumaarafi, jeta une grenade pour faire diversion et tira à bout portant sur le président le tuant sur le coup.

Sans faire la lumière sur l'assassinat de Boudiaf, la commission d’enquête instituée par le Pouvoir écarte la thèse de l’«action isolée» d’un officier de l’armée ayant agi pour des motifs strictement religieux.