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Les nanoparticules de dioxyde de titane donnent leur blancheur aux dentifrices et à la sauce à salade «à la française», par exemple. Elles protègent des UV dans les crèmes solaires et sont présentes en tant qu'additif dans de nombreux produits alimentaires, chewing-gum, glaçages au sucre, bonbons ou guimauves notamment.

Or les personnes souffrant de pathologies inflammatoires chroniques intestinales comme la maladie de Crohn ou la colite ulcéreuse feraient mieux de renoncer aux denrées alimentaires en contenant, avertissent des chercheurs de l'Université de Zurich (Suisse).

Chez ces patients en effet, les nanoparticules de dioxyde de titane passent la barrière intestinale endommagée et peuvent se retrouver dans les cellules du corps. C'est ce que vient de montrer l'équipe de Gerhard Rogler, professeur de gastro-entérologie et hépatologie, dans la revue Gut.

Les scientifiques ont d'abord démontré in vitro que les particules sont capables de pénétrer dans les cellules épithéliales humaines de l'intestin et dans les macrophages (cellules immunitaires), et de s'y accumuler. A l'intérieur des cellules, elles déclenchent une réaction immunitaire et la production de messagers chimiques suscitant une inflammation.

Les chercheurs suisses ont également relevé chez des patients souffrant de colite ulcéreuse - dont la barrière intestinale est endommagée - des concentrations plus élevées de dioxyde de titane dans le sang. «Cela montre que sous certaines conditions pathologiques, ces particules peuvent être assimilées par la nourriture», souligne le Pr Rogler, cité dans un communiqué de l'Université de Zurich.

Finalement, de la nourriture contenant du nanodioxyde de titane a été administrée à des souris souffrant d'inflammation intestinale. Résultat: une inflammation aggravée et des dommages importants aux muqueuses de l'intestin. Des cristaux de dioxyde de titane s'accumulent en outre dans la rate.

D'autres études sont nécessaires pour vérifier si les mêmes causes produisent les mêmes effets chez l'humain, souligne l'Université de Zurich. En attendant, les patients souffrant d'un trouble de la barrière intestinale seraient bien inspirés de s'abstenir, conclut le Pr Rogler.

La maladie de Crohn, la colite ulcéreuse et d'autres pathologies inflammatoires chroniques sont en progression dans de nombreux pays industrialisés depuis quelques décennies. Outre des facteurs génétiques et le stress, le mode de vie occidental et en particulier la nourriture semble jouer un rôle essentiel.

L'équipe de Gerhard Rogler a axé ses travaux sur l'inflammasome NLRP3, un complexe multi-protéique qui fait partie du système immunitaire non spécifique. Il reconnaît les signaux de danger - en l'occurrence les nanoparticules - et déclenche une réaction inflammatoire.

De précédents travaux franco-suisses controversés avaient montré en 2011 une réaction similaire du complexe NLRP3 dans les poumons en présence de dioxyde de titane, à des doses très élevées cependant.

Il n'y a pas pour l'heure de restriction à l'utilisation de ce produit dans l'industrie alimentaire. Sont considérées comme nanoparticules celles dont le diamètre n'excède pas 100 nanomètres (milliardième de mètre).