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A qui profiterait «le crime» dans l’affaire Eric Laurent et Catherine Graciet, ces deux journalistes français accusés d’avoir réclamé une somme d’argent conséquente au roi du Maroc pour ne pas publier un livre compromettant à son égard? «Regardons à l’Est», répond l’hebdomadaire marocain la Nouvelle Tribune dans l’édito de son fondateur, Fahd Yata. Il évoque, sans rien en prouver, une supposée manipulation par les services secrets algériens des deux journalistes mis en examen samedi à Paris pour chantage et extorsion de fonds. Pour lui, l’affaire n’est que «la face visible d’un iceberg nauséabond».

L’agenda algérien caché des journalistes: c’est une vieille accusation au Maroc. A chaque fois qu’un journaliste livre des révélations sur un dysfonctionnement du royaume ou un scandale marocain, la presse tente l’hypothèse de la main de l’Algérie.

Dans le journal en ligne 360, le mieux informé des histoires du palais et des affaires policières du royaume, le journaliste Mohammed Chakir Alaoui avait déjà dénoncé en février dernier le soi-disant «tropisme algérien» de la journaliste Catherine Graciet, sans apporter de preuve.

Rencontré dimanche à Rabat par le journal français Libération, Mohammed Chakir Alaoui rappelait, d’une manière plus générale, «que les instances internationales ont toujours su que ceux qui ont essayé de porter atteinte à l’intégrité du royaume étaient payés par les ennemis de l’intégrité du royaume». Mais qui sont ces ennemis? «Pas besoin de vous faire un dessin», affirme le journaliste.
Traduction: Alger payerait des opposants marocains et des journalistes écrivant à charge contre le Maroc. Mais les médias marocains n’apportent aucun élément factuel permettant de le démontrer.

Derrière l’accusation de la main d’Alger, il y a aussi une incompréhension, chez les défenseurs du royaume marocain, à l’égard des attaques formulées par les médias français. Mohammed Chakir Alaoui, lui, dénonce l’entêtement de «ces journalistes à ne pas vouloir comprendre la portée et la nature des liens qui unissent le peuple et son roi». En clair, les journalistes français peuvent bien aujourd’hui écrire ce qu’ils veulent, les Marocains ne seraient pas dupes.

Selon le blogueur Ibn Kafka, écrire la moindre ligne tant soit peu critique aujourd’hui sur le royaume ne pourrait être lue qu’à l’aune de la tentative d’extorsion. Lundi, à la mi-journée, Le Seuil, la maison d’édition de Laurent et Graciet, a indiqué qu’il ne publierait pas le livre.