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A l'heure actuelle, la Libye est divisée entre deux forces principales: le parlement basé à Tobrouk et le gouvernement d’union nationale soutenu par l’ONU, installé à Tripoli, le tout sous la menace de nombreux groupes armés, notamment Daesh qui tentent également de contrôler le pays.

Le 15 février, les deux chefs liés au parlement de Tobrouk, dont le général Khalifa Haftar, l’ancien ministre de la Défense du gouvernement basé à Tobrouk qui existait avant le gouvernement de Tripoli, ont refusé une invitation à se rendre au Caire, proposée par des représentants du gouvernement soutenu par l’ONU, selon l’agence de presse turque Anadolu citant Fayez al-Sarraj, chef du gouvernement de Tripoli. Les négociations parrainées par l’Egypte visaient à aborder les différences entre les deux forces politiques, mais toutes les tentatives visant à les amener à la table des négociations se sont révélées vaines.

Paradoxalement, le gouvernement d'union nationale a été établi en 2016 pour surmonter la période de diarchie qui existait en Libye depuis 2014, quand l’Etat avait été divisé entre le gouvernement de Tobrouk et celui basé à Tripoli, composé d’islamistes. Les parties ont convenu de créer un gouvernement d’entente nationale, proposé par l’ONU le 17 décembre 2015.

Mais la transition vers ce nouveau gouvernement a écarté le général Khalifa Haftar, ce qui a provoqué davantage de clivages au sein de l’élite politique libyenne. En outre, ce gouvernement n’a pas sa propre armée, c’est pourquoi il existe à Tripoli de nombreux groupes armés rivaux. Certains d’entre eux soutiennent le gouvernement, d’autres sont liés à Daesh.

En octobre 2016, une faction de combattants a défié le gouvernement d'union nationale en proclamant leur propre gouvernement. Ils se sont emparés d'un bâtiment parlementaire et échangé des tirs avec des groupes loyalistes. Cette situations reflète la Libye dans son ensemble, où militaires et milices tribales déterminent la vie quotidienne de la population sans aucune considération pour les autorités centrales.

La semaine dernière, un autre groupe de combattants a annoncé la création d’un autre organisme, la Garde nationale libyenne. Bien qu’ils affirment n'être liés à aucun parti politique ou tribu, ils sont déjà impliqués dans des affrontements armés avec ceux qui soutiennent le gouvernement d’union nationale.

Dans le même temps, le gouvernement d’union nationale a annoncé ne pas être en mesure de faire face à la situation et a envoyé le 16 février, selon Reuters, une requête officielle à l’OTAN demandant de l’aide pour entraîner et renforcer les forces armées libyennes.

La Libye avait plongé dans le chaos, accéléré avec l’ingérence de la France et la Grande Bretagne dans le conflit, après le renversement et le meurtre du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, en 2011. S'en était suivie une violente guerre civile, dans laquelle l’OTAN et ses alliés avaient soutenu les rebelles.

Avant la crise de 2011, la Libye avait une économie prospère, tirée de ses importantes recettes pétrolières, capable de créer des emplois pour des centaines de milliers de personnes. Kadhafi luttait également contre les trafiquants d’êtres humains et autres passeurs.

La ville natale de Kadhafi, Syrte, est toujours contrôlée par Daesh qui s'en était emparée en 2015. Daesh s’est répandu en Libye au cours de ces deux dernières années. Selon des estimations de l’ONU, entre 2.000 et 3.000 terroristes de Daesh combattent en Libye, dont 1.500 à Syrte.

La France et la Grande Bretagne, qui avaient soutenu à l’époque les «combattants de la liberté» luttant contre Kadhafi, semble désormais réaliser que l’intervention en Libye en 2011 était une erreur.

«La Libye est un autre pays ayant connu trop d’interventions. Selon moi, Kadhafi aurait dû rester au pouvoir, parce qu’il était une sorte de force stabilisatrice», a confié le générale de l’armée américaine Paul Vallely, en octobre 2016. «C’était Obama et le département d’Etat qui y ont mis en place les vente d’armes, armé les Frères musulmans et soutenu les éléments radicaux d’Al-Qaïda», a-t-il ajouté.

Un député du Parlement européen, Georg Mayer, a lui aussi dénoncé cette intervention occidentale. «Ce que nous voyons et ce que nous avons vu c’est que beaucoup de gens sont morts dans cette guerre civile, beaucoup de gens souffrent de la guerre civile, beaucoup de gens souffrent sous le joug de Daesh et ils cherchent bien sûr à sortir de ces zones de guerre. Et c’est ce que nous voyons en Europe. Des gens arrivent ou veulent venir pour s’installer dans un lieu plus sûr», a-t-il expliqué.

En janvier, le directeur sortant de la CIA John Brennan a admis que les Etats-Unis avaient commis des erreurs dans leur évaluation du Printemps arabe, créant ainsi un terreau fertile pour les terroristes au lieu d’ouvrir une voie vers la démocratie.

«Je pense qu’il y avait des attentes très irréelles à Washington, qui pensait que le Printemps arabe pouvait chasser ces régimes autoritaires et voir ensuite la démocratie prospérer», a-t-il déclaré dans une interview à CNN.

Il a conclu en disant que ce que les gens au Moyen-Orient et en Afrique du Nord souhaitaient, c'était la liberté «pour eux-mêmes, leur groupe ou leur tribu», parce que «la notion de démocratie n’est pas enracinée dans ces cultures et ces pays».