Spain Catalonia Independence
Après dépouillement de plus de 97% des bulletins de vote, les résultats des élections régionales en Catalogne sont sans appel. Les deux listes indépendantistes catalanes ont obtenu dimanche soir la majorité absolue des sièges au parlement régional, un score qu'elles estiment suffisant pour lancer le processus indépendantiste.

La liste de la coalition «Junts pel Si» rassemblant des partis de gauche et de droite, ainsi que des associations pro-indépendance a obtenu 62 sièges, selon les résultats officiels diffusés par la région. La liste de La CUP (candidature d'unité populaire) a obtenu de son côté 10 sièges. A elles deux, elles totalisent donc 72 sièges sur 135.

Le président indépendantiste sortant Artur Mas a revendiqué la victoire, en lançant: «Nous avons gagné!» «A l'Etat espagnol, sans rancoeur, adieu», a lancé sur son compte twitter Antonio Banos, chef du petit parti indépendantiste de la gauche anticapitaliste CUP.

Les partis coalisés derrière Artur Mas au sein d'«Ensemble pour le oui» doivent toutefois encore s'entendre avec la CUP pour former une majorité.

Celle-ci a jusqu'à présent soutenu que l'indépendance ne pouvait pas être proclamée sans une nette majorité des voix. Elle ne veut pas non plus reconduire au pouvoir le conservateur Artur Mas, auquel elle reproche sa politique d'austérité.

Les autres partis ont appelés les indépendantistes à ne pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, évoquant des surprises possibles après une participation exceptionnelle.

Selon les chiffres du gouvernement régional de Catalogne, la participation a atteint 76,75%, dépassant de 9 points celle du dernier scrutin régional en 2012.

Artur Mas est parvenu à transformer ce scrutin en plébiscite, promettant qu'en cas de victoire, lui et ses alliés mèneraient la Catalogne vers l'indépendance, en 2017 au plus tard.

Depuis trois ans, Artur Mas n'avait cessé d'exiger un référendum d'autodétermination semblable à celui organisé en Ecosse il y a un an, où le non l'avait emporté. Mais Madrid a toujours refusé, arguant de son inconstitutionnalité.

A la faveur de la crise et de médiocres relations avec le pouvoir central, le nationalisme de nombreux Catalans fiers de leur culture a viré à l'indépendantisme.

Le chef du gouvernement conservateur, Mariano Rajoy, s'est impliqué personnellement dans la campagne, plaidant pour une «Espagne unie», et dressant la liste des catastrophes qui, selon lui, guettent les Catalans en cas d'indépendance unilatérale: exclusion de l'UE, explosion du chômage, effondrement des retraites.

Les autres votes se seraient portés surtout sur les libéraux de Ciudadanos (19 à 21 sièges), résolument opposés à l'indépendance, qui deviendraient le second parti de Catalogne, le Parti socialiste (14 à 16 sièges) qui prône une révision de la Constitution pour accorder plus d'autonomie aux Catalans, et à la gauche radicale ralliée autour de Podemos, nouveau parti anticapitaliste allié du grec Syriza. Le Parti Populaire de Mariano Rajoy s'effondrerait et passerait de 19 sièges à 11 maximum.

Si la Catalogne s'en allait, elle emporterait avec elle un cinquième du PIB de l'Espagne, quatrième économie de la zone euro, et un quart de ses exportations. L'éventualité inquiète banquiers et entrepreneurs, qui invitent au dialogue entre Madrid et Barcelone.

Quel que soit le résultat final, ce scrutin fait entrer l'Espagne dans une zone de fortes turbulences, à trois mois des élections législatives. D'autant que le gouvernement a prévenu qu'il agirait contre tout acte «illégal».