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La compagnie espagnole, propriétaire de l’avion qu’elle avait loué à Air Algérie, a été mise en examen jeudi pour «homicides involontaires par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité». Il s’agit de la première mise en examen dans cette enquête.

Le 24 juillet 2014, l’appareil, un McDonnell-83, qui effectuait un vol Ouagadougou-Alger s’était écrasé dans le nord du Mali avec à son bord 110 passagers, dont 6 Algériens, 51 Français; 20 citoyens du Burkina Faso; 8 libanaises; ainsi que 5 Canadiens, des Allemands, des Luxembourgeois, un citoyen de la Suisse, de la Belgique, de l’Égypte, de l'Ukraine, du Nigeria, du Cameroun et du Mali, plus les six (06) membres d'équipage étaient Espagnols.

D’après une expertise judiciaire rendue en décembre 2016, l’accident a été provoqué par la non-activation du système antigivre des sondes moteur par les pilotes alors que les conditions météorologiques, notamment la présence d’un orage sur la route de l’avion, requéraient sa mise en place. Le givrage des sondes avait conduit à une diminution de la vitesse de l’appareil, puis à son décrochage qui n’avait pu être rattrapé.

Ce scénario avait déjà été retenu par le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) en avril 2016.

Les conclusions des experts judiciaires, dont l’AFP a eu connaissance, sont sévères pour Swiftair qui n’avait jamais connu d’accident grave jusqu’alors.

A leurs yeux, l’entraînement «insuffisant et incomplet» des deux pilotes contribue à expliquer «la non-détection» de la perte de vitesse de l’appareil et leur «manque de réaction adaptée» quand il a commencé à décrocher.

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Le commandant de bord n’avait jamais «réalisé les exercices sur simulateur relatifs à la prévention et la récupération du décrochage», en infraction à la réglementation européenne, notent ainsi les experts.

Par ailleurs, les deux pilotes, saisonniers, ne volaient que quelques mois par an avec de longues périodes d’interruption, ce qui a contribué à «rabaisser leur niveau de performances face à des situations inusuelles», estiment les experts.

Après huit mois d’inactivité, le commandant de bord et sa copilote Isabel Gost n’avaient repris leur travail que quelques semaines avant le crash.

«Ni le BEA français, ni les magistrats espagnols, qui ont aussi diligenté une enquête, n’ont retenu la responsabilité de Swiftair qui ne peut comprendre être mise en examen aujourd’hui en France pour les mêmes faits», ont réagi auprès de l’AFP ses avocats Sébastien Schapira et Marion Grégoire.

«Recourir à des compagnies aériennes qui n’emploient leurs pilotes qu’à titre saisonnier est clairement une entrave à la sécurité des passagers», ont affirmé de leur côté Me Sébastien Busy et Me Bertrand Courtois, qui représentent environ 200 parties civiles. «Nous ne relâcherons pas notre attention jusqu’à ce que l’ensemble des responsabilités puissent être clairement définies».

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Outre la responsabilité de Swiftair «évidente» à leurs yeux, ils pointent celle d’une société burkinabè chargée de transmettre le plan du vol AH 5017 aux autorités aériennes du pays ce jour-là.

«Ce document ne leur est jamais parvenu, ce qui a eu une conséquence dramatique: les autorités aériennes du Burkina ont fourni un nouveau plan de vol aux pilotes juste avant le décollage qui a fait passer l’appareil tout près de l’orage», ont-ils relevé.